Démographie. Quelle pression sur la biodiversité ?

La relation entre la démographie et la dégradation de l’environnement est loin d’être linéaire… Un changement radical de nos rapports à la biodiversité sera néanmoins obligatoire si l’on veut la assurer son avenir. © Pixabay 

Alors que l’ONU annonce le franchissement du seuil des 8 milliards d’êtres humains sur notre planète, la Fondation pour la Recherche sur la Biodiversité s’interroge sur les liens entre démographie et érosion du vivant. Quels rôles joue l’augmentation continue du nombre d’humains dans cette érosion – mais aussi l’évolution au sens darwinien – de la biodiversité ? La note « La démographie, une des pressions indirectes identifiées par l’Ipbes (Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques) » examine cette pression et la manière dont elle peut influencer les facteurs directs et indirects façonnant les milieux et leurs vivants. Cet aspect peu abordé dans la littérature scientifique constitue à ce titre un « front de science », une question appelant à des recherches inédites.

Moteurs indirects et pressions directes.   Dans son évaluation mondiale sur la biodiversité et les services éco-systémiques, l’Ipbes distingue, d’une part, les « moteurs directs » de son érosion et, d’autre part, les « moteurs indirects ». Ces derniers sont pensés comme les causes profondes des atteintes à la biodiversité, tels que la démographie humaine, la consommation, l’économie, les échanges commerciaux, les progrès technologiques, les institutions, la gouvernance, etc.étayés par un système de valeurs et de choix de comportement. Ces moteurs indirects rétroagissent et aggravent les pressions directes exercées sur la biodiversité.

Une dégradation loin d’être linéaire.   Les interactions entre la biodiversité et les moteurs directs ont été – et demeurent – l’objet de nombreuses recherches. En revanche, l’étude des relations entre la biodiversité et les moteurs indirects, notamment la démographie, semble moins fréquente. S’il existe une incidence évidente de la croissance des populations humaines sur les pressions, notamment directes, qui pèsent sur la biodiversité, cette note met aussi en lumière le fait que la relation entre le nombre d’humains et la dégradation de l’environnement est loin d’être linéaire. Elle permet donc d’envisager un découplage entre démographie et impact humain. Ce découplage impliquerait une réduction des pressions directes (par l’éducation, la réglementation ou les incitations de toute nature, etc.), mais aussi des actions menées sur des facteurs indirects de pression (par la réflexion sur certaines technologies, modes de gestion des espaces, de consommation, de modèles économiques, de gouvernance, de fiscalité, réglementation, etc.).

Changer nos rapports au vivant.   Alors que la consommation des ressources naturelles et des biens de consommation par habitant s’accroît et se mondialise entre pays développés et pays émergents, la réduction des impacts anthropiques, dans un contexte de croissance de la population humaine, pourrait passer par une réduction et une rationalisation de l’utilisation globale des ressources naturelles. Cette réduction et cette rationalisation sous-entendent, elles-mêmes, une révision des modes de production au niveau mondial et une meilleure répartition des ressources. Ce levier d’action semble le plus facile à envisager dans la mesure où agir sur les évolutions démographiques reste un sujet épineux et suppose, de plus, un effet d’inertie. Par ailleurs, il est aussi démontré que certaines modalités de gestion des espaces naturels ou anthropisés s’avèrent favorables à la biodiversité. Un dernier élément de réflexion autour de cette nécessaire transition vers la durabilité souligne qu’elle ne pourra sans doute pas se faire sans un profond changement de notre rapport au vivant et de notre regard sur la biodiversité, souvent réduite à un ensemble de « ressources » pour l’espèce humaine. 

Source : Note rédigée par les membres du Conseil scientifique 2018-2021 de la FRB, avec le soutien du ministère de la Transition Ecologique.

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